Les causes psychologiques de la procrastination, de Jane Burka & Lenora Yuen

La procrastination est la tendance à différer, à remettre au lendemain une décision ou l’exécution d’une action. Très souvent, nous associons la procrastination à la paresse, au manque de discipline, à un caractère faible de la personne qui procrastine.

 

Et si cette vision était trop simpliste ? Si derrière cette tendance à éviter l’action se trouvaient des mécanismes psychologiques plus profonds que juste l’envie d’esquiver le travail ou l’effort ?

 

Jane Burka et Lenora Yuen sont 2 chercheuses universitaires qui s’occupent de procrastination depuis plusieurs décennies. A travers leur livre « La procrastination : pourquoi vous le faites, comment l’adresser maintenant », elles souhaites partager tout ce qu’elles ont appris sur ce sujet à travers leurs études et l’accompagnement de milliers de personnes.

 

En suivant la même structure du livre, je vais dédier 2 vidéos à ce sujet : celle d’aujourd’hui est dédiée aux raisons psychologiques profondes à l’origine de la procrastination. La prochaine vidéo sera dédiée aux stratégies à adopter pour la dépasser.

 

La procrastination est une stratégie psychologique pour se protéger : de manière souvent inconsciente, le procrastinateur a peur que s’il agit, ses actions pourraient lui causer des problèmes plus graves que la procrastination elle-même.

Voilà ce qui pourrait être le manifeste du procrastinateur :

  • Je dois être parfait
  • Tout ce que je fais doit réussir facilement et sans effort
  • C’est plus sûr de ne rien faire que de prendre des risques et échouer
  • Je ne dois pas avoir de limitations
  • Si ce n’est pas bien fait, autant ne pas le faire du tout
  • Je dois éviter les défis
  • Si je réussis, quelqu’un d’autre sera blessé
  • Si je fais bien cette fois-ci, je devrai toujours bien faire
  • Suivre les règles de quelqu’un d’autre signifie céder, ne pas être en contrôle
  • Je ne peux pas me permettre de laisser tomber quoi que ce soit ou qui que ce soit
  • Si je montre comment je suis vraiment, les gens ne vont pas m’apprécier
  • La bonne réponse existe, et j’attendrai jusqu’à quand je ne l’aurai pas trouvée

 

Les cinq peurs à la base de la procrastination

Ce manifeste reflète une manière de penser et de ressentir qui empêche de progresser.

Il cache 5 peurs profondes qui peuvent être à l’origine de la procrastination :

  • La peur de l’échec : pour certains, le sentiment de valeur personnelle est directement lié à leur habilité (compétence intellectuelle, réussite professionnelle, performance sportive…), qui est prouvée uniquement par les résultats obtenus. Dans ce cas, la procrastination agit comme mécanisme de défense : puisque nous n’avons pas tout donné, on n’a pas fait de notre mieux, les résultats ne reflètent plus notre habilité. Le besoin de montrer sa valeur par se performances est aussi à l’origine du perfectionnisme : afin de prouver tout ce dont ils sont capables, les perfectionnistes visent des objectifs impossibles à atteindre. Découragés, ils utilisent la procrastination pour fuir leurs attentes irréalistes.
  • La peur du succès : à l’opposé, pour certains la procrastination est le mécanisme qui permet d’éviter les conséquences négatives associées au succès. Par exemple, nous pouvons penser que le succès va nous demander d’accepter des responsabilités ou des engagements que nous ne sommes pas prêts à assumer. Ou encore, que notre succès va forcément faire du mal à quelqu’un : aux autres (notre famille ou nos amis pourraient se sentir diminués ou inadéquats si nous avons du succès), ou à nous-mêmes (les personnes autour de nous vont s’éloigner ou se venger).
  • La peur de perdre l’autonomie : pour certaines personnes particulièrement sensibles à se sentir contrôlées par d’autres, qui s’opposent à toute règle et résistent toute demande externe, la procrastination devient une manière de toujours se sentir en contrôle. Elles sentent le pouvoir de toujours décider quand réaliser une action, indépendamment des demandes des autres, tout en évitant une confrontation directe. Ce besoin d’autonomie prend les dessus malgré ses propres envies ou son intérêt personnel.
  • La peur de la séparation et de l’intimité : parfois, la procrastination est utilisée comme un moyen pour réguler la distance émotive avec les autres. Pour certains, le besoin de se sentir constamment aidés et supportés par d’autres empêche de prendre des actions en autonomie : ils attendent l’arrivée d’une aide externe pour avancer. Pour d’autres, le besoin de garder une distance de sécurité pour protéger leur intimité les pousse à ne pas prendre ou respecter des engagements : ils réduisent les attentes des autres vis-à-vis d’eux, et se gardent plus d’autonomie.

 

La relation psychologique avec le temps

Un autre élément qui peut grandement influencer notre tendance à la procrastination est notre relation psychologique avec le temps. Les anciens Grecques avaient identifié deux notions de temps, avec lesquelles nous nous confrontons tous les jours.

La première est appelée « chronos », et représente le temps objectif, celui mesuré par la montre et le calendrier, inexorable et prédictible. La deuxième est appelé « kairos » : elle représente le temps subjectifet correspond à notre propre expérience individuelle du passage du temps. Parfois, surtout lors d’activités plaisantes, nous avons l’impression que le temps passe à toute vitesse. D’autres, surtout quand nous nous ennuyons, chaque moment semble s’éterniser.

 

Notre perception du temps évolue dans les différentes étapes de notre vie :

  • Le temps du nourrisson: ici seulement existe l’instant présent. La satisfaction des besoins ou pulsions doit être immédiate, toute attente provoque une peur et une anxiété insupportables.
  • Le temps de l’enfant : à ce stade, on commence à comprendre la notion du passage et de la structuration du temps (il y a des moments pour dormir, manger, jouer…), et en prendre en compte le temps des autres (c’est ok d’attendre quelques minutes pour que nos parents nous donnent à manger)
  • Le temps de l’adolescent : en ce moment, le passage du temps devient une expérience concrète, à travers les changements que nous constatons dans notre corps et les premières décisions structurantes, comme le choix des études. Le futur offre des opportunités infinies.
  • Le temps du jeune adulte : notre relation au temps est de plus en plus influencée par la réalité, nous prenons conscience que nous n’aurons pas le temps pour tout ; mais le temps reste de toute manière une ressource très abondante.
  • Le temps de la quarantaine: ce stade implique un énorme changement dans notre relation au temps. Nous ne sommes plus une jeune personne avec un futur plein de potentiel ; en tant qu’adultes, nous sommes supposés vivre à la hauteur de notre potentiel. Et nous découvrons nos limitations : peut-être que nous ne pourrons plus concrétiser certains rêves d’enfance, comme être champion olympique ou gagner le prix nobel.
  • Le temps du senior : à ce stade, des réalités comme la perte et la mort sont très présentes ; des notions comme « demain » ou « un jour » ont de moins en moins de valeur. Selon notre relation au temps, l’acceptation du passé peut porter au désespoir ou à la paix.

 

Rester coincé dans un certain rapport au temps alors que nous sommes passé à une autre étape de notre vie peut amener à la procrastination. Vivre comme si le temps n’existait pas rend difficile prendre des bonnes décisions pour le futur ; rester coincé dans notre passé ne nous permet pas de vivre pleinement le présent.

 

Comprendre et savoir gérer à la fois le temps subjectif et le temps objectif, savoir passer confortablement de l’un à l’autre, démontre une bonne maturité dans notre rapport au temps. Cela nous permet de bien vivre en jonglant avec les contraintes du temps qui passe, plutôt que d’essayer de lutter en vain contre lui.

 

Les valeurs et croyances familiales

D’autres éléments qui influencent notre tendance à la procrastination sont les valeurs et les croyances que notre famille nous a apprises pendant notre enfance.

Dans leurs études, les autrices du livre ont identifié 5 thèmes familiaux primaires qui accompagnent les peurs à la base de la procrastination. Les voilà en synthèse :

  • La pression, typique des familles tournée vers l’accomplissement, où seule la performance à un top niveau est appréciée. La perfection est toujours recherchée, les limitations sont inacceptables. Dans cet environnement, la procrastination élimine le risque d’échec après avoir fait de son mieux.
  • Le doute, exprimé directement vers le manque de capacités de l’enfant, ou indirectement via un manque d’intérêt. Dans cet environnement, la procrastination est le moyen d’éviter les challenges par manque de confiance : tout échec, même si très petit, confirme que toutes les doutes sont vraies.
  • Le contrôle, pour les familles où les parents prennent toutes les décisions pour l’enfant. Même quand c’est lié à des bonnes intentions, comme vouloir éviter à l’enfant de faire des erreurs, cet environnement est très dur à vivre. Puisque une rébellion directe est trop risquée, procrastiner devient une bonne manière de se rebeller sans trop s’exposer.
  • L’attachement, quand le parent ne prennent pas juste le rôle de support et d’encouragement vis à vis des enfants, mais carrément d’un ballon de sauvetage indispensable même en l’âge adulte. Les envies d’autonomie ou d’indépendance sont condamnées ; la procrastination permet de rester toujours attaché à sa famille.
  • La distance, typique des familles où les membres sont incapables de développer des liens émotionnels, de l’affection physique ou un intérêt mutuel. Les sentiments sont rarement exprimés. En apprenant qu’il faut faire face aux situations et aux problèmes en parfaite solitude, la procrastination est un moyen de garder les autres à la bonne distance.

 

Peut-être après cette vidéo, vous avez acquis plus d’éléments pour comprendre que la procrastination n’est pas le résultat de la paresse, du manque de discipline, ou d’un caractère faible.

Des mécanismes psychologiques plus profonds sont impliqués, qui ont comme objectif de nous protéger des conséquences que nous percevons comme plus négatives que l’immobilisme et l’incapacité de passer à l’action.

Dans la prochaine vidéo, vous découvrirez quelles stratégies vous pouvez adopter pour dépasser votre tendance à la procrastination, et de cette manière améliorer votre confiance en vous-mêmes.

 

Est-ce que vous vous reconnaissez dans certaines de ces peurs ou d’environnements familiaux dans lesquels vous avez grandis ?

Comment ces éléments impactent négativement votre tendance à la procrastination ?

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